Amy : solutions et gelées de gomme
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Thèse présenté à Faculté des Sciences de l'Université de Paris

pour obtenir le grade de Docteur es Sciences Physiques

par

 

Lucien Amy

 

Contribution à l'étude des propriétés et de la structure des solutions et des gelées de gomme

 

soutenue le 13 juin 1934

 

devant la commission d'examen :

Auger, V., président

Mouton, H. et Darmois, E., examinateurs

 

 

 

INTRODUCTION

 

Les gommes hydrophiles sont des produits d'excrétion d'origine végétale, amorphes, incristallisables, neutres ou légèrement acides, donnant avec l'eau des mucilages plus ou moins épais, soit qu'ils s'y dissolvent, soit qu'ils se gonflent simplement au contact de ce solvant.


Un très grand nombre d'espèces végétale sont susceptibles de produire des gommes hydrophiles. La plupart d'entre elles appartiennent à la famille des légumineuses et à celle des rosacées. A cette dernière se rattachent les arbres fruitiers de nos pays produisant les gommes, dites indigènes, tandis que la première comprend notamment les genres Acacia, et Astragalus qui fournissent les seules gommes pratiquement utilisées (arabique et adragante). Rien. que pour le genre Acacia, il existerait d'après M. le professeur Perrot, plus de 400 espèces différentes.


Les gommes ont été connues et utilisées à des fins thérapeutiques dès l'antiquité. Pline, Dioscoride, Théophraste en font mention dans leurs écrits. A l'époque moderne, les premiers mémoires traitant les gommes que nous avons retrouvés, sont ceux de Prosper Albin et de Jacob Dubois, mais il faut arriver à Vauquelin pour obtenir les premières indications chimiques précises. Les auteurs qui ont étudié les gommes ont cherché à élucider deux questions très différentes : origine et signification physiologique d'une part, constitution chimique d'autre part. origine anatomique est actuellement à peu près connue ; les gommes proviendraient d'une modification des membranes cellulaires de l'assise génératrice (Lutz). Cette transformation se propageant de proche en proche envahirait les différents tissus, puis gagnerait les canaux, ce qui provoquerait l'excrétion. La cause de cette altération est vraisemblablement très variable. La gomme arabique se formerait à la suite de piqûres d'insectes (Perrot), peut-être par contamination bactérienne, mais cette dernière origine est encore discutée. On ignore en quoi consiste exactement la transformation, car la composition des gommes n'est pas encore complètement élucidée.


Les premiers auteurs qui se sont occupés de rechercher les propriétés physiques et chimiques des gommes paraissent s'être beaucoup préoccupés de les classer. Actuellement, on se contente généralement de distinguer les gommes complètement solubles dans l'eau, telles que la gomme arabique, les gommes demi-solubles (gomme de cerisier) et les gammes insolubles (gomme Bassora). En fait, cette distinction n'est qu'approximative. D'une part, il n'existe vraisemblablement aucune gomme rigoureusement insoluble ou complètement soluble ; d'autre part, il existe tous les intermédiaires entre ces deux catégories. Voici en effet les valeurs de la proportion de la fraction insoluble d'un certain nombre de gommes (Perrot, Lemeland, Gérard).

Ces valeurs ne sont qu'approximatives, probablement parce qu'elles varient d'un échantillon à l'autre. En effet, alors que Perrot indique que la gomme de Cochlospermum est insoluble, Lemeland constate que 2,6 % sont solubles ; de même cet auteur classe la gomme de Gezireh parmi les gommes entièrement solubles alors que Vée l'indique comme presque entièrement soluble.


Les solutions de gommes sont douées de pouvoir rotatoire (Biot). Cette grandeur est très variable d'une espèce à l'autre et même pour une espèce donnée d'un échantillon à l'autre. Voici en effet quelques-unes des valeurs obtenues par Vée, Lemeland et Hamy :

Ces valeurs montrent que les substances renfermées dans les différentes espèces sont différentes les unes des autres et sont vraisemblablement formées elles-mêmes de mélanges dont les proportions varient avec les échantillons.


Toutes les gommes renferment une certaine proportion d'eau généralement comprise entre 10 et 20 %. Par un chauffage prolongé à 100°, elles perdent cette eau sans que leurs propriétés en soient modifiées.


Si l'on élève la température jusqu'à 150°, les gommes solubles comme la gomme arabique se transforment et deviennent insolubles (Frémy), sans que cette transformation entraîne une nouvelle perte de poids (Gélis).


Une ébullition prolongée dans l'eau ou l'action des alcalis à froid, produit la transformation inverse et redissout la gomme Les gommes insolubles (gomme adragante) et la fraction insoluble des gommes partiellement solubles (gommes de pays) se dissolvent de la même manière (Frémy, Guérin). On pouvait donc penser que les différentes gommes ne différaient entre elles que par une transformation de la fraction soluble en insoluble (Frémy).


Une température suffisamment élevée, transforme successivement les gommes en caramel, puis en charbon, enfin, il reste toujours une petite quantité de cendres blanches.


Vauquelin effectuant cette dernière opération simultanément avec du sucre de canne, du sucre de lait, de la gomme arabique, de la gomme de pays et de la gomme Bassora, note la similitude des résultats et en conclut que les gommes sont des sucres imparfaits mélangés à une petite quantité de cendres.


La proportion de ces cendres est assez variable. De même que le pouvoir rotatoire, mais dans des limites beaucoup plus étroites, elle varie d'un échantillon à l'autre pour des gommes de même espèce et surtout d'une espèce à l'autre. C'est ainsi que Graeger a trouvé pour la gomme ara-bique, des nombres variant de 3 à 3,35 % et que Lemeland a obtenu des nombres compris entre 2,3 % (gommes du Brésil et de Kordofan) et 6 % (gomme de Cochlospermum).


Les cendres sont presque exclusivement formées de chaux, magnésie et potasse. Les proportions de ces éléments sont encore variables suivant les échantillons et les espèces. Graeger par exemple a trouvé dans l'analyse des cendres de trois échantillons de gomme arabique que la teneur en chauxvariait de 44 à 54 %, celle en magnésie de 12 à 26 % et celle en potasse de 30 à 40 %.


En dehors des cendres, les gommes ne renferment que du carbone, de l'hydrogène, de l'oxygène et une petite quantité d'azote inférieure à 1 p. 100, Cruickshands. Tous les auteurs sont d'accord pour admettre que l'azote n'existe qu'à l'état d'impureté, résidu probable du contenu cellulaire. Après élimination des cendres, les gommes ne renferment que des substances ternaires.


Opérant sur des échantillons purifiés (?) par récipitation au sous-acétate de plomb, Berzélius a trouvé pour la partie organique de la gomme arabique, une composition très voisine de celle du saccharose C12H22O11.


Par oxydation de la gomme arabique au moyen de l'acide azotique, Scheele avait obtenu un acide que Laugier a identifié avec l'acide mucique obtenu dans les mêmes conditions à partir du sucre de lait. D'autre part, le contact prolongé des gommes avec les acides étendus les transforme et les décompose en produits plus simples : les gommes insolubles se solubilisent dans l'eau, le pouvoir rotatoire des gommes solubles se modifie (Béchamp); enfin, les Solutions normalement inactives vis-à-vis de la liqueur cupropotassique deviennent fortement réductrices. Dans le cas de la gomme arabique, la transformation est complète après un traitement d'une heure environ à la température de 105-106° et en présence d'acide sulfurique à 2 %. Le pouvoir rotatoire de la gomme passe alors de — 30° à - 60° environ (Bourquelot). Dans la solution de gomme arabique ainsi dégradée, Biot et Persoz, les premiers, ont entrevu l'existence d'un sucre fermentescible. Les recherches de Scheibler et de Kiliani ont permis d'isoler successivement deux sucres, l'arabinose et le galactose. Pendant longtemps, les auteurs considérèrent les gommes comme exclusivement formées de produits de condensation d'arabinose et de galactose (mélanges d'arabanes et de alactanes) ; il aurait du reste été plus exact de dire arabino-galactanes, puisque l'on n'avait pas isolé de produits fournissant exclusivement de l'arabinose ou du galactose.


Lemeland par exemple donne les nombres suivants obtenus en dosant les pentoses sous forme de dérivés futurologiques .et le galactose à l'état d'acide mucique; pentoses 33,4 % (Cochlospermum) à 76,3 % (prunier) et galactose 13,4 % (prunier) à 51,8 % (Feronica elephantum). La plupart des résultats de Lemeland sont d'ailleurs fortement déficitaires en ce sens que la somme pentanes-galactanes ne représente pas le poids total de l'échantillon analysé (elle n'atteint pas 70 % dans le cas de la gomme d'abricotier). Il était donc probable qu'il restait d'autres éléments non dosés dans les produits d'hydrolyse. En effet, dès 1910, Meininger établissait l'existence d'un méthylpentose dans les produits d'hydrolyse de la gomme arabique, puis Schirmer obtenait également un produit analogue à partir des gommes de Anegeissus latifolius et Odina Wodier. Enfin, en 1929, Butler et Cretcher établissaient que le méthylpentose de Meininger était du rhamnose et trouvaient en plus de l'arabinose et du galactose l'acide d-glucuronique combiné molécule à molécule avec le galactose à l'état d'acide aldobionique. La répartition des produits d'hydrolyse de la gomme arabique étant finalement la suivante : acide aldobionique 28,3 % ; rhamnose 14,2 % ; galactose 29,5 % et arabinose 34,4 %.


En résumé, la partie organique de la gomme arabique (l'arabine) et vraisemblablement celles des autres gommes sont des complexes ternaires formés par la condensation d'acides uroniques et de sucres parmi lesquels on a déjà isolé le galactose, l'arabinose et le rhamnose.


Quant au poids moléculaire de ce complexe, le seul résultat certain dont on puisse tenir compte à ce sujet est celui qu'aobtenu Graham  a montré que la gomme arabique ne traversait qu'avec une extrême lenteur lesmembranes de parchemin, que c'était donc un colloïde dont le poids moléculaire était par suite très élevé. L'étude de la dégradation de l'arabine avait conduit O'Sullivan à proposer pour cette substance la formule C89H142O74, soit un poids moléculaire de 2 394. Mais, d'après Scheibler les produits obtenus par O'Sullivan seraient de simples mélanges de sucres.


Quelle relation existe-t-il entre la partie minérale des gommes et la partie organique? Pour Frémy, l'arabine serait un acide, l'acide gummique ou acide arabique, le calcium, le magnésium et le potassium salifiant cet acide dans la gomme naturelle. L'opinion de Frémy était encore très discutée au moment où nous avons commencé notre travail et en 1920 M. le professeur Perrot pouvait encore écrire que la question était entière.


Nous nous sommes proposé d'étudier la nature de la combinaison entre la fraction minérale et la fraction organique des gommes hydrophiles. Nous avons choisi parce que facile à se procurer la gomme arabique comme gomme soluble et celle de cerisier comme gomme insoluble.


Dès le début de nos recherches, nous avons observé un certain nombre de faits nouveaux se produisant au cours de la dissolution de la gomme arabique. Ces observations nous ont conduit à séparer une fraction insoluble dans la gomme arabique vraie. D'autre part, une étude critique des méthodes de préparation de l'arabine nous a montré qu'il se produisait des modifications au cours de nos opérations. Nous avons ainsi été amené à étudier une méthode de préparation rationnelle de l'arabine et à étudier ses propriétés acides.


Après avoir établi d'une manière certaine l'existence de - telles fonctions, nous avons étudié la valeur de leur coefficient de dissociation par des mesures électrométriques, puis nous avons cherché à contrôler les résultats par d'autres méthodes physiques : le pouvoir rotatoire, la viscosité et la conductibilité. Nous avons effectué un travail analogue pour la gelée de gomme de cerisier.


Au cours de ces différentes recherches, nous avons constaté ; certains phénomènes particuliers se produisant pendant la dissolution; pour approfondir ces phénomènes, nous avonsétudié la diffusion des arabates.


Enfin, en discutant l'ensemble des résultats, nous avons pu constater qu'aucune des théories sur la structure des solutions colloïdales, exposées jusqu'ici, ne permettait de les expliquer. Nous avons proposé une théorie nouvelle dans ce but.


Notre travail est divisé de la manière suivante :

PREMIERE PARTIE. — Gomme arabique.

1° Phénomènes se produisant au cours de la dissolution : isolement d'une fraction insoluble ;

2° Préparation de l'arabine. Etude de ses principales propriétés (acidité, pouvoir rotatoire, viscosité, conductibilité diffusion, etc.) ;

3° Etude sommaire de la fraction insoluble de la gomme arabique;

DEUXIEME PARTIE. — Gomme de cerisier.

TROISIÈME PARTIE. — Discussion des résultats.

 

 

 

 

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